par M. L. Pasteur, 1868
Mais quel est donc l’établissement où les laboratoires sont à ce degré malsains, humides, obscurs, mal aérés? C’est le premier établissement d’instruction supérieure de la France, celui qui porte le nom de la patrie, comme s’il voulait résumer en lui seul toute la gloire scientifique et littéraire : c’est le Collège de France ! La Sorbonne est mieux installée peut-être ? Hélas ! le dernier laboratoire de chimie que l’on y ait construit est une pièce humide et sombre de plus d’un mètre en contrebas de la rue Saint-Jacques. Cela s’appelle, ô dérision ! le laboratoire de perfectionnement et des recherches.
Oserai-je parler des ressources pécuniaires et matérielles des laboratoires français ? Qui voudra me croire quand j’affirmerai qu’il n’y a pas au budget de l’Instruction publique, un denier affecté aux progrès des sciences physiques par les laboratoires : que c’est grâce à une fiction et à une tolérance administrative que les savants, envisagés comme professeurs, peuvent prélever sur le trésor public quelques-unes des dépenses de leurs travaux personnels, au détriment des allocations destinées aux frais de leur enseignement. Aussi combien n’en nommerai-je pas qui contribuent de leur patrimoine aux dépenses par lesquelles ils honorent leur pays!
Je termine par un autre exemple frappant de la fâcheuse organisation de notre système scientifique : les faits sont notoires et s’appliquent à un des Membres de l’Académie des Sciences. Depuis dix années ce savant n’a pas eu un seul jour à son service l’aide d’un garçon de laboratoire… A toutes les demandes qu’il a adressées pour s’affranchir de cet office subalterne, il lui a été répondu, — et c’était vrai, — qu’il n’y avait pas de rubrique de budget qui pût motiver la création … d’un emploi de garçon de laboratoire.